lundi 7 juin 2010

United Colors ?

La Cour de Cassation italienne a établi le 1er juin dernier que les couples "racistes", opposés à l'adoption d'enfants "de couleur", ne peuvent pas adopter du tout d'enfants, selon un jugement cité par les médias italiens.
Cette décision de justice intervient après le recours exercé par une association de protection des enfants contre un couple de Siciliens qui ne voulait pas adopter d’enfants « à peau foncée ».
La Cour va encore plus loin et ajoute que le magistrat doit aussi se poser la question de savoir si le fait même de poser ce genre de limitations ne signifie pas tout simplement qu'il est inopportun de laisser un tel couple "raciste" adopter un enfant.
Comme dautres (cf le billet de DucThien), je ne suis pas super à l'aise avec cette décision.
Je la trouve contradictoire: comment peut-on demander aux futurs parents de mûrement réfléchir à leur projet d'adoption , d'en définir les limites, d'être bien clair sur ce qu'ils peuvent accepter ou non, notamment en termes de particularités, et ensuite dire qu'il est raciste de ne pas vouloir adopter d'enfants noirs, ou asiatiques, ou indiens...? 
Il est tellement reproché de manquer de préparation, de n'avoir pas réfléchi à ses limites! Vaut-il mieux être dans le politiquement correct, puis ne pas "assumer", ne pas s'attacher, et finalement, voir l'adoption échouer?  Il n'est pas forcément évident d'accepter (et d'être capable de gérer) que ses futurs enfants seront exposés au racisme, car oui, notre société est raciste. De façon très insidieuse parfois... et c'est pas toujours simple à gérer!!
Certes, des parents ont parfois des demandes clairement discriminantes, et même un peu eugénistes, mais les acteurs de l'agrément sont, me semble-t-il, largement capables de les détecter, et de les éliminer du processus d'agrément. Il est clair qu'un fondement raciste ne peut être valable pour une adoption.
Dans un article paru sur Slate en mars, assez dérangeant lui aussi, Angie Chuang expli­quait qu’aux Etats-Unis, il existe une hié­rar­chie inavouée de l’adoption: "en pre­mière posi­tion, ce sont des enfants blancs, amé­ri­cains ou venant des ex-pays sovié­tiques et des pays de l’Est. Quand les légis­la­tions natio­nales ren­daient l’adoption plus dif­fi­cile, la Chine et les autres régions d’Asie étaient le deuxième choix. Puis vient l’Amérique latine et enfin l’Afrique et Haïti (sans prendre en compte l’effet mul­ti­pli­ca­teur du séisme). Les petits noirs amé­ri­cains arrivent en der­nière position."
Mais la jour­na­liste met­ en même temps en garde contre les débats à une seule voix et men­tion­ne les contra­dic­tions aux­quels sont sou­mis les parents adoptants:
"On reproche aux blancs d’être réti­cents quant à l’adoption d’enfants noirs, mais on reproche aussi aux parents adop­tifs de petits noirs né pas être capables de pré­pa­rer leur(s) enfant(s) à faire face à la dis­cri­mi­na­tion ou à s’approprier leur identité"
Enfin, un autre éclairage rassurant du blogueur Patrick Lozès: " Pour juste qu’elle me semble, cette décision risque d’être mal comprise si elle n’est pas correctement expliquée.

L’objectif n’est pas d’imposer aux parents l’adoption d’enfants de telle ou telle couleur, mais d’empêcher l’adoption par des parents qui manifestement n’hésitent pas à violer les lois interdisant la discrimination." Dit comme ça, c'est tout de suite beaucoup plus clair et beaucoup plus acceptable!
Sources: NouvelObs, LeFigaro, Slate, Slate
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1 commentaire:

  1. La décision de justice de la cour de cassation ne me mets pas mal à l'aise mais me fait réfléchir.
    Tout d'abord l'adoption, c'est évidemment donner une famille à un enfant, mais c'est aussi permettre à des parents d'avoir un enfant.
    Quand un couple a un enfant biologique, il sait que l'enfant aura sa couleur de peau, mais il ne s'est pas comment il sera et il doit accepter aussi le sexe qu'il ne peut choisir.
    En tant que mère adoptive, je n'ai pas choisi mes enfants. J'ai par contre choisi leur couleur de peau en choisissant leur pays de naissance (grande probabilité de la couleur de peau, mais s'il peut y avoir des métissages).
    Je savais que ma fille aurait la peau noire et cela ne m'a pas posé de problème.
    C'est vrai que pour moi, cela me paraît impossible de ne pas accepter un enfant qui a la peau noire. Mais est-ce que je dois juger ou imposer mes idées et mon ressenti ? Est-ce la couleur de peau qui permet la création d'un lien ? Est-ce que dans ce cas, on ne devrait pas dire que peut-être les couples adoptants n'ont pas fait le deuil de l'enfant biologique qui est censé leur ressembler ?L'essence de l'adoption n'est-elle pas d'adopter un enfant qui ne vous ressemble pas ? Ne faut-il pas accepter que l'enfant ne vous ressemble pas ? car de toute façon il ne vous ressemblera pas.
    Cette question est donc délicate... Je sais que des parents biologiques n'arrivent pas à créer non plus des liens avec leur bébé qui pourtant ont la même couleur de peau qu'eux.
    Je pense aussi qu'il ne faut pas adopter si on n'a pas fait le deuil de l'enfant biologique qui va vous ressembler. L'adoption c'est vouloir un enfant qui de toute façon ne vous ressemblera pas, un enfant que vous allez aimer avec toute sa différence ! Il faut être clair dans sa tête.
    Alors faut-il imposer, condamner .... ?

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