mercredi 30 décembre 2009

Les Hmongs, population abandonnée et ballotée par l'Histoire

Une fin d'année assombrie par l'explusion de Hmongs de leur camp thaï... un sujet que je ne connais pas du tout; j'ai trouvé cet article de RFI très pédagogique, et pas uniquement baigné de sensiblerie comme c'est souvent le cas dans des articles sur ce type de sujet...
Edifiant...

Les Hmongs, population abandonnée et ballotée par l'Histoire

La Thaïlande a achevé, ce mardi 29 décembre 2009, l'expulsion vers le Laos de 4 371 Hmongs qui se trouvaient sur son territoire. « Le rapatriement est fini et il n'y a pas eu de problème », a affirmé le Premier ministre thaïlandais, Abhisit Vejjajiva. Bangkok considérait ces Hmongs comme des migrants économiques illégaux et non comme des réfugiés politiques ou de guerre.
Au moment de la guerre d'Indochine, les Hmongs, populations montagnardes, qui ne représentent aujourd'hui que quatre millions de personnes, ont en partie pris fait et cause pour la France. Toutefois, après la débâcle de Dien Bien Phu en 1954, le gouvernement français s'est détourné d'eux. Les Hmongs sont, pour la première fois, abandonnés. Dans les années 60, la guerre au Vietnam bat son plein. Une partie des Hmongs du Laos est recrutée par la CIA pour participer à une guerre secrète contre les Nord-Vietnamiens. En 1975, les Américains se retirent du pays. La guerre est perdue. Les Hmongs sont, pour la deuxième fois, abandonnés à leur sort.
Persécutions
Héritage de la guerre froide : les Hmongs sont considérés depuis cette époque comme des traitres et persécutés comme tels par les autorités laotiennes. En trente ans, des dizaines de milliers de personnes ont fui vers la Thaïlande afin de trouver refuge dans le royaume. En 2004, quatre à cinq mille Hmongs débarquent dans le nord-est du pays. Un village, celui de Huay Nam Khao va alors se transformer en un camp insalubre de réfugiés, contrôlé par l'armée thaïlandaise. Médecins Sans Frontières est l'une des rares organisations à travailler dans ce camp où Marie-Pierre Allier, la présidente de MSF s'est rendue plusieurs fois.
L'armée manipule l'aide humanitaire et à Bangkok les autorités ont déjà fait le choix du Laos au détriment des populations Hmong. Fin 2007, les gouvernements laotiens et thaïlandais signent d’ailleurs un accord sur le rapatriement des Hmongs.
Tous les prétextes semblent bons pour rapatrier ceux que la Thaïlande considère donc comme des immigrants économiques illégaux. D'après certains témoignages, certains Hmongs vont jusqu'à pratiquer l'automutilation pour éviter d'être expulsés de force. En mai 2008, la situation dans le camp de Huay Nam Khao dégénère. Des dizaines de Hmongs entament une grève de la faim. Un incendie se déclenche et ravage une partie des habitations de fortune des réfugiés. Le 30 mai 2008, l'ONG « Urgence Humanitaire Asie », reçoit un appel à l'aide de l'un des représentants Hmongs qui habite dans le camp.
Du camp, ce responsable Hmong en appelle aux Etats-Unis et à la France pour qu'ils interviennent afin d'empêcher une expulsion programmée. Aucune réponse ! Aucun soutien formel, ni de Paris, ni de Washington. Estimant ne plus pouvoir travailler dans de bonnes conditions, Médecins Sans Frontières quitte le camp de Huay Nam Khao à la fin du mois de mai 2009.
Acharnement ?
Pourquoi les Hmongs sont-ils victimes de tant d'acharnement de la part des autorités thaïlandaises? D'abord, les Hmongs sont peu nombreux. Ce sont des populations montagnardes marginalisées qui ne présentent aucun enjeu stratégique majeur. Sauf pour la Thaïlande qui a décidé de solder un héritage vieux de la guerre froide ; et ce, pour une raison principale : les relations économiques avec le Laos.
La Thaïlande exporte chaque année près de deux milliards de dollars de marchandises vers le régime communiste. Le royaume est le premier partenaire commercial du Laos. En 2006, les deux pays renforcent leurs liens économiques et comme par hasard c'est à cette époque que la Thaïlande durcit le ton vis-à-vis de la communauté Hmong installée sur son territoire.
Intérêts économiques
Autre élément: depuis plusieurs années, le Laos et la Thaïlande réalisent ensemble le plus grand barrage hydroélectrique d'Asie du Sud-Est, le barrage de Nam Teun 2, situé sur le territoire laotien. Cet ouvrage construit par un consortium emmené par Electricité de France doit entrer en service dans les prochaines semaines. Or, 95% des 1 070 mégawatts de puissance affichée seront exportés vers la Thaïlande. C'est ce qui s'appelle un partenariat stratégique! Dans ce contexte, les intérêts de quelques milliers de Hmongs expulsés vers le Laos ne pesaient pas lourd.
Certes, les condamnations internationales ont fusé, mais rien concrètement n’a été fait pour empêcher l’expulsion des Hmongs considérés comme des traitres dans leur pays.
Résignation et désespoir
La résignation et le profond désespoir de Vanida Thepsouvanh, la présidente du Mouvement lao pour les droits de l'homme, s'expliquent lorsque l'on s'intéresse de près aux populations qui ont été expulsées. Ce mardi, le Haut commissariat aux réfugiés révélait que parmi les Hmongs expulsés, il y a avait 158 personnes : beaucoup de femmes et d'enfants que le HCR avait répertoriés dans la catégorie des réfugiés politiques. Pour l’organisation onusienne, la Thaïlande a violé la Convention internationale qui protège les réfugiés.
Seulement, le royaume n'a jamais signé ce texte et se protège en affirmant que son gouvernement a reçu des assurances de la part du Laos. Selon les autorités laotiennes les Hmongs seront amnistiés et bien traités. Certains d'entre eux pourraient même être réinstallés dans un pays tiers. Demande à laquelle la Thaïlande n'a jamais accédée quand ces populations étaient sur sol !
De son côté, le HCR n'a aucune représentation au Laos et donc aucun moyen de superviser un éventuel processus de réinstallation dans un pays d’accueil. Personne ne sait aujourd’hui comment ces Hmongs seront pris en charge par le régime communiste. Et beaucoup d’organisations craignent pour la vie de ces réfugiés ballotés par l’histoire.
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